A l'occasion de la parution de L'espérance d'un baiser (Robert Laffont), Raphaël Esrail, l'un des derniers survivants d'Auschwitz, tint une conférence à l'auditorium E.J. Safra du Mémorial de la Shoah, dimanche 8 octobre. Souvent émouvant, toujours prenant, parfois traversé d'un éclair de gaieté, cet exposé de deux heures me permit de découvrir un destin hors du commun que seul un enchaînement de miracles put façonner au cœur d'un enfer d'où des millions jamais ne revinrent. Aux côtés du président de l'Union des déportés d'Auschwitz, Serge Moati animait cette conférence avec tout le talent qu'on lui connaît. Le livre abondamment surligné de son voisin devant lui, le grand journaliste ne cachait pas l'admiration que lui inspirait son aîné, cet éternel amoureux de 92 ans que Liliane, son épouse réchappée elle aussi de la géhenne, couvait des yeux, assise à quelques pas de moi. Lorsque vint mon tour de faire dédicacer mon exemplaire, je m'en voulus d'imposer ce pensum à un homme qui avait pourtant traversé d'autres épreuves. J'aurais aimé, avant de m'éclipser, lui serrer la main, lui témoigner ma sympathie, et ne pas me contenter, en reprenant mon livre, d'un simple remerciement. Comme si souvent dans ma vie, je partis sans avoir osé.
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Si toutes les vies se valent, certaines, en revanche, méritent plus que d'autres d'être contées, n'en déplaise aux fervents partisans de l'autofiction, dont je suis. L'enfer sur Terre possède d'innombrables cercles, d'innombrables sillons plus ou moins supportables selon que l'on s'éloigne ou non du centre. Qui n'en a jamais traversé, même en courant, n'appartient pas à ce monde.
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